Se perdre, se retrouver
Je ne suis pas une grande marcheuse. J’aime la montagne l’été, et je pars quelquefois en balade.
J’avais pris la voiture avec un projet précis : un tour en forêt sur un sentier balisé, au-dessus du village.
Je n’ai d’abord pas trouvé le carrefour d’où j’avais prévu de démarrer. J’ai consulté la carte, et j’ai changé mon plan.
Je me suis engagée sur une route large et caillouteuse, plus que balisée. Il faisait beau, point trop chaud ; j’avais dans mon sac une gourde d’eau fraîche et un coupe-vent léger.
Arrivée au lieu-dit “Le gros chêne”, point de vue obligé où un banc vous indique que le paysage mérite d’être admiré, je perds les balises. Je regarde la carte, je me dis c’est par ici, ou bien plutôt par là… Je m’engage, je reviens sur mes pas, je repars.
Les marques des forestiers signalent leurs sentiers. Je savais que ce n’était pas les repères que je cherchais, mais j’ai poursuivi mon chemin.
J’étais seule, la forêt m’appartenait. Je pouvais me croire très loin de tout. Des bouffées d’une joie pleine me gagnaient dans ces moments.
J’ai marché. Au bout d’un temps, j’ai commencé à penser que je m’étais perdue. Je n’en étais pas sûre. Parfois un détail, la forme d’un arbre, un relief, rapporté à ma carte, me faisait penser que j’étais sur le bon chemin.
C’étaient maintenant des bouffées d’angoisse, la solitude comme un puits sans fond.
Mais au plus intime je savais que je ne pouvais pas perdre totalement pied. La conviction était là, même fragile, que je me retrouverais. La solitude était si intense et si désirable. Mais toujours des indices, un bruit d’avion, le moteur d’une voiture dans le lointain, me rappelaient que je n’étais pas loin. Au pire, je marcherais plus longtemps.
J’ai traversé une route, j’ai cru que c’était celle-ci, alors que c’était celle-là. J’ai tourné en rond ; revu un carrefour, aperçu des pique-niqueurs déjà rencontrés. Je leur ai demandé mon chemin ; ils m’ont fourni une fausse indication. J’ai marché sur la route. Au croisement, des panneaux m’ont remise sur la bonne voie.
Je savais que ma voiture serait là, au prochain tournant. Mais est-on jamais sûre ?
Je l’ai retrouvée avec plaisir.
Laisser un commentaire